Mémoires de la forêt, tome 1 : Les souvenirs de Ferdinand Taupe – Avis lecture
Pourquoi, et pour qui écrit-on ? Pour soi… pour les autres. Pour les deux à la fois. Pour faire passer un message, pour exprimer sa joie, sa colère ou son indignation, pour partager un bout de sagesse et de philosophie… pour le simple plaisir d’écrire. Ou encore, pour se souvenir.
La mémoire, ainsi que l’inexorable passage du temps, est un sujet qui me fascine depuis bien longtemps. Si j’écris, c’est non seulement pour partager un peu de moi avec autrui, mais aussi pour ne pas risquer de perdre ces précieux moments qui parsèment le fil de ma vie. De cette magnifique étoffe qui, chaque jour, se tisse et se colore un peu plus, je ne veux rien perdre. J’aimerais tant pouvoir me rappeler chaque instant… les graver en mon esprit. Le premier sourire de mes fils. La douceur d’une main tant aimée sur la mienne. Les petits bonheurs du quotidien, l’odeur sucrée des pains au chocolat le dimanche matin. J’ai peur d’oublier… alors j’écris. Je note, je consigne, je découpe et je colle, milliers de papiers ornementés qui viennent adorner les pages de ce journal qui ne me quitte plus.
L’ouvrage jeunesse Mémoires de la forêt traite exactement de cela, et plus encore… la maladie de « l’oubli-tout » est en effet au cœur de ce livre que j’ai absolument adoré. L’oubli-tout… cette satanée maladie nommée en l’honneur de celui qui, le premier, la diagnostiqua chez ses patients. C’est en 1906 qu’Aloïs Alzheimer isola cette forme de neurodégénérescence évolutive et irréversible. Tant de personnes, pour la plupart parmi les couches de la population plus âgée, en sont atteintes. Si elle n’est pas – la plupart du temps – héréditaire, la maladie d’Alzheimer touche durement le patient, qui se voit peu à peu privé de ses facultés cognitives, ainsi que ses proches, qui se retrouvent face à un être qui au fil des jours s’éloigne de plus en plus de celui ou celle qu’il/elle avait toujours été.
Le premier tome de la série Mémoires de la forêt – Les souvenirs de Ferdinand Taupe de l’auteur Mickaël Brun-Arnaud nous présente Archibald Renard, fier propriétaire de la libraire du village de Bellécorce. Au sein de son établissement, chaque animal peut, selon son désir, léguer son ouvrage à la librairie dans l’attente et l’espoir qu’un jour, un acheteur vienne s’en acquérir. En ce beau matin forestier, un mystérieux animal vient emporter les Mémoires d’Outre-terre de Ferdinand Taupe, une petite taupe maintenant bien âgée… qui, en cette même journée, s’enquiert de son ouvrage qu’il désire justement récupérer ! Depuis quelque temps, Ferdinand perd ses souvenirs… il est atteint de cette fichue maladie. L’oubli-tout lui a effacé la mémoire, et c’est aux côtés d’Archibald qu’il partira à la poursuite de son passé, soigneusement consigné dans son autobiographie. D’aventure en aventure, les deux compères remonteront le fil du mystère… et vivront de nombreuses péripéties !
Fruit du travail d’un ancien psychologue spécialisé en gérontologie reconverti en libraire, ce livre jeunesse est un véritable coup de cœur. Rédigée d’une plume fluide et colorée, l’histoire nous emporte dans un univers parsemé de magnifiques illustrations qui parvient à nous décrire avec simplicité et justesse les effets de la maladie. Un tour de force, qui reflète la maîtrise de l’auteur sur ce sujet bien difficile. Pour avoir, moi aussi, été confrontée à la perte d’un membre de ma famille des suites d’Alzheimer, la lecture des Mémoires de la forêt m’a profondément touchée. J’y ai reconnu des expériences de mon vécu, et j’ai, je l’avoue, été émue aux larmes à plusieurs reprises. Dieu, comme les souvenirs peuvent être douloureux…
Une lecture magnifique, que je recommande aux petits comme aux plus grands.
Pour en savoir plus sur la maladie d’Alzheimer : https://alzheimer.be/la-maladie-dalzheimer/
La librairie de Mickaël Brun-Arnaud : https://lerenarddore.fr/
Mémoires de la forêt, Mickaël Brun-Arnaud, Sanoe (illustratrice). L’Ecole des Loisirs.